Précarité étudiante : Des dizaines de milliers de jeunes Belges touchés

14 janvier 2022 Enseignement

C’est un phénomène dont les médias parlent déjà depuis des années… En 2019, un étudiant français était allé jusqu’à s’immoler par le feu pour le dénoncer : La précarité étudiante. Il s’agit désormais d’une notion indissociable des études supérieures, dont les coûts représentent encore un obstacle pour de nombreux jeunes. Et la crise sanitaire n’a fait qu’aggraver les choses. En novembre 2021, une délégation de 200 jeunes menée par la Fédération des Étudiants Francophones (FEF) s’était rendue au siège du gouvernement pour manifester contre « l’absence de mesures politiques structurelles de lutte contre la précarité croissante des étudiants ». Dans ce billet, on te propose de faire le point ensemble sur la situation chez nous, en Belgique.

Il faut bien définir la précarité étudiante

La précarité étudiante est une notion multidimensionnelle indissociable des conditions de vie des étudiants. Elle désigne une situation où un jeune, en insécurité financière à cause des coûts liés directement et indirectement à ses études, n’a plus les moyens de jouir pleinement de ses droits fondamentaux (droit à l’alimentation, droit à la santé, droit à une vie sociale et culturelle, droit à l’accès numérique, etc.).

C’est une situation provisoire pouvant mener vers une meilleure condition… ou vers une bien pire : la pauvreté. Le jeune en situation de précarité étudiante doit parfois faire l’impasse sur un repas, un soin de santé, une activité… Et ce, parfois, malgré l’intervention d’une aide sociale ou d’un revenu lié à un job étudiant. Cette situation réduit ses chances de réussite par rapport aux étudiants qui ne rencontrent pas de difficultés financières. Ce phénomène sous-tend dès lors une inégalité des chances structurelle, liée à la condition socio-économique, à la situation familiale, à la santé ou encore à la nationalité de l’étudiant.

Combien de jeunes sont concernés en Belgique ?

Le nombre 80.000 est parfois avancé par les médias, mais ça n’est pas une donnée officielle. Elle est difficilement mesurable parce qu’il n’y a pas une définition exacte et consensuelle (= sur laquelle tout le monde est d’accord) de ce qui est considéré comme un état de précarité étudiante.

Si l’on se fie à l’enquête SONECOM-BDO sur les conditions de vie des étudiants de l’enseignement supérieur en Fédération Wallonie-Bruxelles commandée en 2019 par le cabinet Marcourt, on parle de 36% des étudiants en situation de précarité objective (c’est à dire faisant face à des problèmes financiers régulièrement et étant dès lors bénéficiaires d’un ou plusieurs dispositifs d’aides sociales). Si l’on calcule 36% du dernier relevé de la population étudiante de l’ARES, cela fait 73.800 étudiants.

Mais l’enquête fait aussi état de 40% d’étudiants en situation de précarité subjective, soit plus de 80.000. Cela comprend les jeunes qui n’ont pas recours à une aide sociale mais qui déclarent eux-mêmes avoir déjà dû renoncer à un repas ou un soin de santé pour payer leurs études, et ceux qui déclarent avoir besoin des revenus liés à leur job étudiant pour assumer les coûts liés à leurs études.

10.000€/ an pour un étudiant en kot et 4.000€ pour le navetteur !

En plus, tout semble indiquer que cette précarité étudiante gagne du terrain et que les étudiants eux-mêmes méconnaissaient souvent les coûts objectifs de la vie étudiante, c’est à dire les coûts directement ET indirectement liés à la vie étudiante, comme le logement, les transports, les sorties, l’alimentation, les vêtements… On estime à 10.000€ l’ensemble des coûts liés à une année d’étude supérieure pour un étudiant en kot (4.500€ de logement et 2.800€ d’alimentation), contre 4.000€ pour un navetteur qui vit chez ses parents.

Pourquoi tant d’étudiants sont en situation de précarité étudiante ?

  • L’enseignement supérieur de plein exercice a connu une augmentation constante de sa population ces dernières années, avec un taux de croissance de 68% entre les années 90 et 2015. D’après les prévisions, elle augmentera de 65.000 individus à l’horizon 2030. Cette croissance a pour première conséquence une diversification de la population étudiante, avec de plus en plus d’étudiants issus de milieux modestes, d’étudiants étrangers et d’étudiants de plus de 25 ans.
  • Les ressources financières de l’étudiant ont fortement évolué ces dernières décennies. Les configurations familiales se sont complexifiées. Les étudiants en situation de rupture familiale, et donc isolés, figurent comme les premiers touchés par la précarité.
  • Suite au décret Paysage, la durée moyenne du parcours des étudiants a été rallongée ce qui rend plus difficile d’en assumer les coûts pour certaines familles.
  • La population étudiante est vieillissante. Ils sont plus nombreux à faire des études jusqu’au-delà de leurs 25 ans. Or, à partir de cet âge, on perd plusieurs avantages comme le tarif étudiant dans les transports en commun et on est obligé de devenir titulaire de sa propre mutuelle.

La précarité étudiante a pour première conséquence une inégalité des chances de réussite entre les étudiants rencontrant des difficultés financières, dont 65% ratent au moins une année dans leur parcours, et les autres étudiants, pour qui ce pourcentage chute à 32%.

Quelles mesures sont prises contre la précarité étudiante ?

La Ministre Glatigny a pris plusieurs engagements en 2021. Le Conseil supérieur des allocations d’études est chargé de mener une réflexion sur les mesures à prendre afin d’augmenter le nombre de bénéficiaires, les montants à octroyer et les conditions permettant d’être considéré comme étudiant « de condition modeste ». Par ailleurs, le gel du minerval devrait être élargi à tous les cursus en 2022.

D’après la FWB, en 2020, près de 99.000 étudiants ont perçu une allocation d’études, enseignements secondaire et supérieur confondus. Mais l’administration traite 140.000 demandes par an, dont 65.000 émanant d’étudiants du supérieur. Il y a donc 30% de demandeurs qui se voient refuser l’octroi d’une bourse.

Infor Jeunes est là pour t’aider à trouver de l’aide !

Ne l’oublie pas, les 15 centres Infor Jeunes en Wallonie sont ouverts, et nos informateurs jeunesse sont à ta disposition, gratuitement, anonymement et sans rendez-vous. Si tu estimes être dans une situation de précarité étudiante, on fera tout ce qu’on peut pour t’aider à améliorer ta situation en t’exposant toutes les aides auxquelles tu peux prétendre, ou encore en t’aidant à compléter ton dossier de demande d’allocation d’études. 👍

Tu peux aussi lire notre brochure sur les frais et aides financières liés aux études supérieures. 😉 Et pour aller plus loin, tu peux revoir notre passage dans l’émission Tendances Première (RTBF) où l’on a longuement évoqué la précarité étudiante et les aides existantes.

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