Où en sommes-nous au niveau de l’inclusivité des personnes trans dans l’enseignement ? Tu te demandes peut-être si les établissements scolaire doivent mettre en place certaines bonnes pratiques pour créer un environnement inclusif, notamment pour les personnes trans. Ainsi, sais-tu que ton établissement d’enseignement a certaines obligations vis-à-vis d’une personne qui change de prénom et/ou de marqueur de genre ? On t’en dit plus ci-dessous !
* Nous nous penchons exclusivement, dans ce billet, sur la thématique de l’inclusion des personnes trans dans l’enseignement obligatoire, vue sous son angle juridique. Ce billet ne se veut pas exhaustif.
Définition des termes
On te propose d’abord de définir quelques notions fondamentales, qui se retrouvent également dans le glossaire compilé par l’association Genres Pluriels.
Quand on parle de sexe, on vise un ensemble de caractéristiques biologiques qui permettent de classer (= ranger) les êtres humains en deux catégories : « mâle » ou « femelle ». Il faut garder à l’esprit que cette distinction se fait de manière assez automatique, sur la base de la différence entre les organes génitaux externes (un homme a un pénis ; une femme a un vagin). Cette représentation binaire (soit l’un, soit l’autre), nie la réalité des personnes intersexuées, qui ont des caractéristiques sexuelles à la fois mâles et femelles. Ces caractéristiques ne se limitent pas aux organes génitaux externes, mais peuvent aussi viser les hormones, les chromosomes, …
Le sexe se distingue du genre. Le genre est construit socialement, ce qui explique qu’il peut varier (= changer) en fonction des époques, de la société dans laquelle vit une personne, de la culture, … En résumé, le genre désigne des rôles, des comportements ou encore des traits de caractères qui sont, à un moment donné et à un endroit donné, attribués à un homme, une femme ou une personne non-binaire.
L’identité de genre vise le genre dans lequel une personne se reconnait. Il ne s’agit pas nécessairement du genre qui lui été assigné (= donné) à la naissance. L’expression de genre renvoie, quant à elle, aux différentes manières (vêtements, attitudes, coiffure, langage, etc.) dont les personnes expriment leur identité de genre, et à la manière dont celle-ci est perçue par les autres.
Une personne trans est une personne dont l’identité de genre et/ou l’expression de genre diffère de celle habituellement associée au genre qui lui a été assigné (= donné) à la naissance.
Cadre législatif autour de l’inclusivité des trans dans l’enseignement
Sache qu’il existe un cadre législatif sur lequel il est possible de s’appuyer pour les questions liées au sexe, à l’orientation sexuelle, à l’identité de genre et/ou l’expression de genre. Sans rentrer dans le détail, il est utile de retenir que ces législations existent tant à l’échelle de la Belgique, de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qu’aux niveaux européen et international.
Changement de prénom & Changement de marqueur de genre
Le Belgique autorise le changement de prénom (choix d’un ou de plusieurs prénoms conformes à l’identité de genre) à partir de l’âge de 12 ans, moyennant l’accord des parents ou du représentant légal.
Et on autorise le changement de marqueur de genre (modification de la mention « M » ou « F ») à partir de l’âge 16 ans. Le nouveau marqueur de genre figurera alors sur tous les documents officiels (p. ex. la carte d’identité, l’acte de naissance, …).
Sache aussi que depuis la rentrée scolaire 2021, les parents ont la possibilité d’inscrire leur enfant mineur en secondaire avec un marqueur de genre neutre (non-binaire). En d’autres termes, les parents ne sont plus obligés de cocher une case « M » ou « F » au moment de l’inscription de leur enfant dans un établissement.
Applications dans l’enseignement
Qu’est-ce que ce changement implique concrètement pour ton établissement ?
Pour les documents liés aux cours, travaux, interros, bulletins de notes, … : il s’agit de documents à usage interne à l’école. Tant qu’il n’y a pas eu de modification officielle de l’état civil, tout va dépendre de l’environnement inclusif de ton école. Pour s’assurer de la conformité avec la législation et les principes actuellement en vigueur, on encourage chaque établissement d’enseignement à faire droit à la demande d’un élève quant à l’utilisation de son prénom social/d’usage, en lieu et place du prénom assigné à la naissance. L’école pourrait par exemple déjà prendre des mesures pour adapter ses registres internes. L’école doit également être particulièrement attentive à ne pas discriminer l’élève ou à l’outer (pour la définition du outing, voir ci-dessous). Il s’agit toutefois à ce stade d’aménagements raisonnables, fondés sur le bon vouloir de l’établissement en question.
Pour les documents officiels (diplôme, par exemple) : l’élève qui a suivi la procédure de changement de prénom peut obtenir une attestation tenant lieu de diplôme qui mentionne ce prénom. Cela nécessite toutefois d’avoir officialisé la demande et d’avoir obtenu une attestation de changement de prénom.
Pour les attestations et autres documents que l’école émet vers l’extérieur (transports en commun, mutuelle, bourse d’étude, etc.) : les documents établis le sont sur la base de l’état civil.
Conclusion : encore des zones d’ombre autour de l’inclusivité des trans dans l’enseignement
Il subsiste malheureusement encore des zones d’ombre quand on se penche sur l’inclusivité des personnes trans dans l’enseignement. En effet, tant qu’il n’y a pas eu d’officialisation et donc de modification de l’état civil (prénom/marqueur de genre), la question du changement de prénom et/ou marqueur de genre est traitée soit directement au niveau de l’établissement (directives de la direction, des centres PMS, désignation d’une personne de référence, formation du personnel, sensibilisation des étudiants, rédaction d’une Charte d’inclusivité, etc.), soit au bon vouloir du personnel enseignant, des éducateurs, etc.
Cela crée évidemment une insécurité sur le plan purement juridique, mais c’est aussi source d’insécurité émotionnelle : exposition à des situations de discrimination ou à des situations dites de outing, c’est-à-dire lorsqu‘on révèle la transidentité sans le consentement, voire contre la volonté de la personne.
L’école s’alignera généralement sur le cadre législatif, qui est actuellement insuffisant. En cas difficultés, on peut explorer plusieurs pistes afin de favoriser l’inclusivité des personnes trans dans l’enseignement. Si une telle personne existe dans ton école, n’hésite pas prendre contact avec la personne de référence au sein de ton établissement (= une personne spécialement formée sur ces questions). Tu peux également te tourner vers l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. L’Institut peut répondre à des consultations individuelles et agir en justice. Tu peux encore prendre contact avec le Médiateur de la Fédération Wallonie-Bruxelles. S’il ne peut pas véritablement trancher dans le cadre d’un conflit, il peut inviter les parties à la cause à discuter ensemble et à dégager une solution dans laquelle les deux parties peuvent se trouver.
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Sources
- Changer de prénom et modifier l’enregistrement du sexe à l’état civil, brochure publiée par l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
- Genres Pluriels – Glossaire.
- Guide d’accompagnement pour l’inclusion des personnes trans dans l’enseignement supérieur en Fédération Wallonie-Bruxelles.
- LGBTQI Inclusive Education Report 2022.
- Ligue des Droits de l’enfant – Ecole pour tou·te·s : La Charte.
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